Un petit tour chez le kiné ? [Valentin]

Loann fit quelques pas en arrière. Doucement. Il venait de voir un chevreuil. Une bête assez grasse. Il se plaça de sorte à ne pas donner un seul signe de sa présence. L’air frais de la forêt était accompagné d’une brume peu épaisse mais parfois traitre. Doucement, il banda son arc et visa. Il respira doucement, puis il décocha sa flèche. La bête n’eut pas le temps de crier. Elle tomba lourdement au sol. Avec un pas sûr, le chevalier avança à travers les arbres pour s’approcher de son gibier. Il retira la flèche, provoquant un craquement venant du crâne. Malgré son poids, il devait être tout à fait capable de porter ce chevreuil jusqu’à chez lui. Il aurait tous le temps de dépecer la bête dans sa salle dédiée. Il sourit à la pensée du plat qu’il pourrait préparer pour Zelda une fois rentré. L’un des rares savoirs qu’il avait acquis malgré sa déscolarisation. Avec son savoir sur les principes d’hygiène, obtenu tant bien que mal auprès d’un boucher de la ville. Après quelques maladies chopées par ci par là, il fallait bien qu’il retienne qu’on ne cuisine pas dans la même pièce que celle servant au dépeçage. Bref, sur ces souvenirs amusant mais totalement falsifié par la malédiction, Loann mit la bête sur son dos et partit chez lui.
Link ne savait pas s’il s’agissait d’une erreur d’inattention, mais lorsqu’il sentit sa jambe glisser, il sut que la chute serait sévère. Pour couronner le tout, il avait eu le malheur de croiser la route d’un cerf qui n’hésita pas à l’attaquer après sa chute. Il avait beau tenter de se lever, rien à faire. Sa cheville était tordue. Il sentit les bois faire craquer ses côtes et son bras se tordre sous la force de l’animal. Loann hurla de douleur. Il fit le mort, espérant que la bête ne chercherait pas à frapper encore plus fort.


Voilà comment Link s’était retrouvé en rééducation, à l’hôpital. Zelda avait réussi à payer les frais de soin en piochant dans ses économies. Et en contractant un crédit. Loann se mordit la lèvre en songeant à la somme qu’elle devrait rembourser. Elle s’était déjà tuée à la tâche pour lui et voilà qu’elle risquait de perdre sa maison. Miteuse certes, mais tout de même. Ayant vécu en tant que SDF pendant quelques années, il savait qu’il valait mieux avoir un toit au-dessus de sa tête. Dans son fauteuil, le blond voulut sortir de l’hôpital, espérant pouvoir tromper sa solitude en l’absence de Zelda. Mais non. L’infirmière l’intercepta et l’envoya au cabinet du kiné, afin de faire travailler son corps. Etouffant une plainte, il se laissa faire. Il songea d’un coup qu’il faudra qu’il travaille sa technique à l’arc et l’épée une fois rétabli. Il n’aimait pas rester sans rien faire. Il fut amené dans une salle d’attente où un brun attendait aussi.

Il observa le jeune homme. Il ne savait pas comment l’aborder étant donné que c’était la première fois qu’il le voyait. D’habitude timide, il avait envie de tromper son ennui. « C’est votre première fois ici ? » demanda-t-il, sans chercher à s’intéresser plus que ça.

Loann fit la moue. Il imaginait ce que c'était de vivre dans quatre mur, avec juste une petite cour pour prendre l'air. "Oui, c'est la cheville." Lui qui avait fait de multiples voyages à travers des landes sauvages, des temples, des palais immenses où des armures douées de vie voulaient sa mort. Où le seigneur des ténèbres avait tenté de le tuer pour répandre le crépuscule partout sur Hyrule. Et voilà qu'un cerf le mettait à mal et le clouait au lit. Son bras venait tout juste de se ressouder, et les côtes aussi. Sa cheville ? Il avait encore fait quelques folies au sein de l'hopital, ce qui lui avait valut un prolongement de séjour. Trois semaines encore. Il avait prit un peu de poids depuis, et avait déjà commencé à programmer des séances de sport pour se remettre. Si rien d'inhabituel ne se passais d'ici là. "J'en ai pour trois semaines encore. C'était d'abord le bras, puis les côtes. La cheville, je l'ai... trop travaillée dernièrement. On m'a rajouté des semaines."

Il tenta de se remettre droit sur son fauteuil et sentit une douleur le lancer à sa cheville. Il étouffa un râle. Il étudia avec attention le brun en face de lui. Il supposait qu'il y avait dû se passer quelque chose, mais le jardin secret des gens devait le rester pour lui. Toutefois, il prit le temps de préparer une phrase. Rien ne pressait, il n'était qu'à l'hôpital en train d'attendre une séance chez le kiné. "Je chassais, et je me suis fait une entorse. Le faux pas. Après, c'est un cerf qui m'a tabassé. J'ai dû faire le mort."

Il souleva son T-shirt pour révéler une blessure. Il y en avait d'autre bien sûr. Datant de sa vie dans le royaume d'Hyrule. De ses parties de chasses. Ah ! Qu'il aurait aimé pouvoir se promener dans la nature sauvage, aux côtés des Zoras, ou encore des Gorons.

Link sut de suite que Valentin allait lui plaire. Il se mit à légèrement rire même si la situation n'était pas drôle en elle même. Il se souvenait de ces moments où il avait du mal à se retenir d'hurler à l'infirmière d'aller dehors. Seulement, on ne pouvait pas le déplacer sans aggraver ses blessures. Et là, il pouvait enfin se déplacer. En fauteuil roulant certes mais il en était capable. Il soupira. Son envie de pratiquer l'escrime augmentait et devenait une véritable obsession.

"Je m'appelle Loann." Il s'avança vers le jeune homme pour mieux le voir. Il s'agissait de son atout après tout. L'observation. Habituellement, il observait plus qu'il ne parlait. C'est ainsi qu'il conservait son courage face aux multiples créatures qu'il avait affronté. Il se souvenait encore de sa peur contre le dragon. Quand il devait se battre dans les airs avec ses grappins. Il expliqua ensuite ce qui s'était passé avec le cerf et Valentin lui montra ses blessures. La torture. Il n'avait jamais connu tout ça. Il n'avait connu que la souffrance de rester un animal pendant des jours mais ce n'était pas comparable.

"Désolé. Ce n'est pas le genre de choses que je souhaiterais vivre." Comme tous le monde évidemment. "J'ai dû vivre une fois où j'étais coincé dans le corps d'un animal. La douleur lors de la transformation était horrible. Et j'ai eu l'impression de devenir fou." Tout ceci commençait à dater. Presque 15 ans maintenant. "C'est quoi votre job en fait ?"